Donner la parole aux enfants pour comprendre de l’intérieur la violence conjugale

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La recherche, à la base de ce livre novateur qui retrace en images les témoignages d’enfants et d’adolescents québécois et franco-ontariens, a été réalisée par Isabelle Côté de l’Université de Laurentienne et Simon Lapierre de l’Université d’Ottawa.

Les auteurs ont rencontré 59 jeunes âgés de 6 à 18 ans sur une période de 5 ans entre 2011 et 2017.

L’idée du livre découle d’une proposition des jeunes qui ont été interviewés par les chercheurs. Ces jeunes ont voulu partager leur expérience pour que cesse la violence.

« Nous avons été étonnés de voir à quel point, pour ces enfants-là, participer à un projet comme celui-là était une source d’empowerment. Ils sortaient du projet avec l’impression d’avoir un peu repris du pouvoir sur leur vie, d’avoir pu contribuer et d’avoir pu aussi possiblement aider d’autres enfants qui vivent dans une situation similaire. »- Simon Lapierre

Entre deux et six enfants par classe vivent dans un contexte de violence conjugale

Au Canada, on estime qu’un demi-million d’enfants vivent dans un contexte de violence conjugale, selon Statistique Canada. Ce problème est présent dans tous les milieux sociaux économiques et culturels.

« Les enfants, quand ils vivent dans un contexte de violence conjugale, ils sont isolés, ils pensent qu’ils sont les seuls à vivre cette réalité. Dans ce sens-là, le livre pourra permettre de réaliser qu’ils ne sont pas les seuls, et du coup, ça devient moins difficile, moins tabou d’en parler », mentionne M. Lapierre.

Les chercheurs croient que les enfants sont les experts de leur vécu. Si leur entourage veut assurer leur sécurité et leur bien-être, ils doivent d’abord comprendre comment les jeunes perçoivent leur situation et quelles sont les stratégies qu’ils ont développées pour y faire face.

Mme Côté a pu constater que lorsque la violence se termine, qu’il y a une séparation ou une rupture du couple, les enfants vont déjà mieux.

« Même si les situations sont difficiles, au moment où les jeunes les vivent, il y a beaucoup de conséquences. Ça peut aller mieux si l’on met en place les bonnes ressources et qu’il y a un bon travail de fait avec eux », précise Mme Côté.

Les illustrations

L’illustratrice Élisabeth Eudes-Pascal a proposé aux auteurs que les citations des enfants soient représentées avec des animaux.

L’utilisation des animaux est un choix moins confrontant, selon elle, et qui facilitait la représentation de la diversité d’expérience vécue par les enfants.

Isabelle Côté croit que ce choix est judicieux.

« Les quelques enfants qui ont eu la chance de voir le livre ont beaucoup apprécié, donc, avec le recul, c’était le bon concept », estime Mme Côté.

Briser le mur du silence

Présente lors du lancement du livre mardi dans le cadre de l’assemblée générale de la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes, Sophie Grégoire avoue qu’elle a eu de la difficulté à lire le livre, qu’elle trouve à la fois troublant, nécessaire et utile.

« Plus on parle du stigma et des tabous qui entourent tout ça et on laisse les enfants parler, plus nous allons comprendre leur réalité, plus nous allons être capables de trouver ensemble des solutions pour améliorer la situation », dit-elle.

Mme Grégoire appelle les gens à s’unir afin de briser le cycle de la violence conjugale.

« Ce n’est pas parce que nous ne le vivons pas dans notre propre famille qu’on n’est pas responsable. Il faut qu’on soit des alliés aux gens qui souffrent pour que ces gens-là puissent s’en sortir », ajoute-t-elle.

Sources : Ici.radio-canada 

Photo : Éditions du remue-ménage

Sylvie Bourque, présidente de la FMHF, Sophie Grégoire-Trudeau et Manon Monastesse, directrice de la FMHF.