L’IVAC ignore les victimes de traite de personnes

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Actuellement, les crimes de traite de personnes (notamment en matière d’exploitation sexuelle et d’exploitation dans le cadre de travail forcé) ne font pas partie de la liste de ceux donnant accès au régime d’indemnisation. Pourtant, étant donné la gravité des séquelles pour les victimes de ces crimes odieux, ce serait hautement souhaitable.

La traite de personnes est le fait de recruter, de déplacer ou d’héberger des personnes en vue de les exploiter (habituellement pour l’industrie du sexe ou le travail forcé). Les trafiquants n’hésitent pas à faire usage de force ou de violence physique ou émotionnelle, à agresser sexuellement leurs victimes, à utiliser la menace, la fraude, la tromperie, l’abus de pouvoir ou une situation de vulnérabilité pour garder ces personnes sous contrôle. La traite de personnes peut se faire à l’intérieur d’un pays ou d’un pays à un autre, peut impliquer de vastes réseaux du crime organisé et constitue sans l’ombre d’un doute une violation des droits fondamentaux de la personne. Les victimes peuvent être contraintes au travail forcé, à la prostitution ou à d’autres formes de servitude, subir des abus et elles risquent des conséquences sérieuses si elles essaient de s’échapper.

Autant la recherche que les intervenantes des organismes signataires constatent que les victimes font face à des préjudices corporels et psychiques sérieux. Il serait donc important qu’elles aient accès au régime. Depuis l’adoption de la loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels en 1972, très peu de nouveaux crimes ont été ajoutés à la liste de ceux donnant accès au régime d’indemnisation.

Le rapport de juin 2008 intitulé L’indemnisation des personnes victimes d’actes criminels — Une question de solidarité et d’équité du Groupe de travail sur la révision du régime d’indemnisation des victimes d’actes criminels mandaté par le ministre de la Justice de l’époque recommandait d’élargir l’admissibilité au régime à : «[…] tous les crimes définis dans le Code criminel, dans la mesure où ils causent un préjudice corporel ou psychique […](Recommandation 3, p. 25)»

Les organismes qui aident les victimes s’étaient réjouis que, dans la stratégie gouvernementale pour prévenir et contrer les violences sexuelles 2016-2021, «Les violences sexuelles, c’est non», l’une des actions mises de l’avant soit l’analyse de la pertinence d’abolir la liste des crimes visés à l’annexe 1 de la loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels et de prévoir que le régime d’indemnisation soit désormais applicable à toute victime d’une infraction contre la personne.

Nous souhaitons donc que la ministre Stéphanie Vallée et le Gouvernement du Québec fassent en sorte que l‘accès au programme de l’IVAC devienne le plus rapidement possible une réalité pour les victimes de la traite des personnes.

Marie-Andrée Fogg, avocate, 

ainsi que 12 organismes signataires:

  • Comité d’action contre la traite humaine interne et internationale  (CATHII)
  • Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF)
  • En marge 12-17
  • Mouvement contre le viol et l’inceste (MVCI)
  • Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI)
  • Le Phare des Affranchi(e)s
  • Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (RQCALACS)
  • Fondation canadienne des femmes
  • Centre pour les victimes d’agression sexuelle de Montréal (CVASM)
  • Maison de Marthe
  • Projet Intervention Prostitution Québec
  • Y des femmes de Montréal

Lettre ouverte parue dans Le Soleil 

photo : Rafael Ben-Ari